PIECES  DE  THEATRE  POUR  ENFANTS.

 
 

COLETTE. - Donnez-les à d'autres.


LA VOIX. - Des sucres d'orge et du pain d'épice.


PETIT PAUL. - Mangez-les vous-même !


LA VOIX. - Une toupie qui tourne toujours.


PETIT PAUL (à part). - Une toupie ! Moi qui en désire tant une ! N'importe. (Haut) Je me moque de votre toupie !


LA VOIX. - Une poupée avec une robe rose.


COLETTE (à part). - Une poupée !...


PETIT PAUL. - Nous n'en voulons pas.


LA VOIX. - Un petit couteau à deux lames.


PETIT PAUL (à part). - Un couteau !... Justement le mien qui est ébréché.


LA VOIX. - Un collier de perles bleues.


COLETTE (bas, à son frère). - Oh ! dis donc, Petit Paul, un collier de perles bleues !


LA VOIX. - Ouvrez bien vite, et je vous donnerai toutes ces belles choses.


PETIT PAUL. - Est-ce vrai d'abord que vous les avez ?


LA VOIX. - Si c'est vrai ! Regardez par le trou de la serrure.


PETIT PAUL (regardant : bas à Colette). - C'est un homme qui a une grande barbe avec un chapeau qui lui vient jusque sur les yeux. Il ne ment pas ; je vois le petit couteau.


COLETTE. - Laisse-moi regarder à mon tour ! (Elle met l’œil au trou de la serrure. Avec joie.) Je l'ai vu... le collier !... le collier bleu !... L'homme le tient par un bout et le fait sauter comme cela. Oh ! le joli collier ! Que je voudrais l'avoir ! Dis donc, Paul, si nous lui ouvrions ?


PETIT PAUL. - C'est que maman l'a bien défendu.


COLETTE. - Tu ne serais pourtant pas fâché, hein ! qu'il te fît cadeau du petit couteau ?


PETIT PAUL. - Sans doute ; mais désobéir à maman ! (À l'homme.) Est-ce bien sûr que vous nous donnerez ce que vous nous promettez ?

L'HOMME. - Entrouvrez seulement la porte, et je vous les passerai par la fente.

COLETTE (à son frère). - Oui, c'est cela ; entrouvre seulement la porte.


PETIT PAUL (à Colette). - Mais, si c'était un voleur ?


COLETTE (avec vivacité). - Ce n'est pas un voleur, puisqu'au lieu de nous vou-
loir rien prendre, il nous apporte des cadeaux.


PETIT PAUL. - Au fait ! c'est vrai. Eh bien, je vais ouvrir. Rien qu'un peu !


COLETTE. - Oui, oui !
     (Petit Paul entrouvre la porte).



SCÈNE III.

L'homme pousse entièrement !a porte, malgré les efforts des enfants pour la retenir.



L'HOMME (avec une grosse voix). - Ah ! Ah ! ce n'est pas dommage ! Vous y avez mis le temps à m'ouvrir !


COLETTE (se cachant derrière son frère). - Ah ! Petit Paul, il me fait peur.


PETIT PAUL. - N'entrez pas ! n'entrez pas !


L'HOMME (continuant). - J'ai cru que vous ne vous y décideriez jamais.


PETIT PAUL (tenant toujours la porte). - Je ne veux pas que vous entriez.


L'HOMME (riant). - Ah ! ah ! ah ! Essayez donc de m'en empêcher ! (Il entre.)


PETIT PAUL. - D'abord où est le petit couteau que vous m'avez promis et le collier dont vous deviez faire cadeau à ma sœur ?


L'HOMME (les leur montrant). - Les voilà.


PETIT PAUL (tendant la main). - Donnez-les-nous.


L'HOMME. - Pas si vite que cela. Pour les avoir, il faut me suivre tous deux.


PETIT PAUL. - Vous suivre !


L'HOMME. - Oui.


PETIT PAUL. - Où cela ?


L'HOMME. - Chez moi.


PETIT PAUL. - Comment chez vous ! Quitter la maison de notre maman !

COLETTE (pleurant). - Je ne veux pas ! je ne veux pas !


L'HOMME. - Que vous le vouliez ou non, il le faudra bien !


PETIT PAUL. - Non ! nous ne nous en irons pas avec vous.


L'HOMME. - Nous verrons bien.


COLETTE (à son frère). - Ah ! Popol, je t'en supplie, cache-moi.


PETIT PAUL (avec résolution). - N'aie pas peur, va ! je saurai bien te défendre.


L'HOMME. - Allons ! Allons ! Ne faisons pas tant de grimaces. Il faut venir.

PETIT PAUL. - Jamais, jamais !


L'HOMME (continuant). - Et tout de suite encore ! Ah ! jamais ! (Il prend chacun des deux enfants par une main. Paul se débat.) Marchons.


PETIT PAUL ET COLETTE (criant et pleurant). - Ah ! mon Dieu! Ah ! mon Dieu !



SCÈNE IV.

La maman Blanchette entre ; les enfants se précipitent dans ses bras.

 


PETIT PAUL. - Maman, maman ! viens à notre secours !


COLETTE. - Oh ! Maman ! Ne nous laisse pas emporter par ce méchant homme qui veut nous conduire chez lui.


BLANCHETTE (à l'homme). - Vous voulez emmener mes enfants, monsieur ?


L'HOMME. - Oui, madame.


BLANCHETTE. - Vous le pouvez ; ce n'est pas moi qui vous en empêcherai.

PETIT PAUL. - Oh ! maman, est-ce que c'est vrai ?


COLETTE. - Est-ce que c'est vrai que tu nous laisseras partir comme cela ?


BLANCHETTE. - Certainement.


PETIT PAUL. - Tu n'aimes donc plus ton gros Popol ?


COLETTE. - Ni ta pauvre petite Colette ?

BLANCHETTE. - Je n'aime pas les enfants indociles. Si vous n'aviez pas ouvert la porte malgré ma défense, ce monsieur ne serait pas entré...


PETIT PAUL ET COLETTE (pleurant). - C'est vrai ! c'est vrai !


PETIT PAUL. - Oh ! nous ne serons plus jamais désobéissants.


COLETTE. - Non, jamais !


PETIT PAUL. - Nous ferons toujours maintenant ce que tu nous diras.


COLETTE. - Oui, bien sûr.


PETIT PAUL. - Si tu nous abandonnais, nous serions bien malheureux.


COLETTE. - Qu'est-ce que nous deviendrions si nous n'avions plus de maman !


PETIT PAUL. - Oh ! maman, garde-nous avec toi !


COLETTE. - Oh ! oui, maman! ma chère petite maman !


BLANCHETTE. - Si je vous pardonne, serez-vous plus soumis à l'avenir ?


PETIT PAUL. Oh ! nous le promettons de tout notre cœur !


COLETTE. - Oui, de tout notre cœur !


BLANCHETTE. - Eh bien ! je consens à vous faire grâce pour cette fois.


LES ENFANTS. - Quel bonheur !


PETIT PAUL. - Et tu nous garderas toujours avec toi ?


BLANCHETTE. - Oui, mon gros Popol.

COLETTE. - Et tu empêcheras ce vilain monsieur de nous faire du mal ?


BLANCHETTE. - Oui, ma petite Colette.


PETIT PAUL. - Et tu nous aimeras encore ?


BLANCHETTE (les embrassant). - Oui, mes enfants.


L'HOMME. - Et moi, pour les engager à tenir leurs bonnes résolutions, je veux faire cadeau à chacun de ce que je lui ai montré. Tiens, Popol, voici le couteau dont tu avais envie ; et toi, Colette, le collier de perles bleues.


PETIT PAUL (prenant le couteau). - Et nous ne serons pas obligés de vous suivre ?


L'HOMME. - Non !


COLETTE (sautant de joie). - Il est pour moi, bien sûr ?


L'HOMME. - Oui !


PETIT PAUL. - Vous n'êtes donc pas un voleur ?


L'HOMME (il enlève sa barbe et son chapeau). - Regarde.


LES DEUX ENFANTS. - L'oncle Cadet !


L'ONCLE. - Oui, l'oncle Cadet qui, d'accord avec votre maman, a voulu mettre à l'épreuve votre obéissance. Ce n'était qu'un voleur pour rire ; mais prenez garde dans une autre occasion.


PETIT PAUL. - Oh! c'est la dernière fois qu'il nous arrive de désobéir.


COLETTE. - Oh ! oui, la dernière fois !


PETIT PAUL ET COLETTE (chantant). -
     Air de Cadet Roussette.


PETIT PAUL. - Jadis on a vu le biquet


COLETTE (répétant). - Jadis on a vu le biquet


PETIT PAUL. - Bien fermer sa porte au loquet.


COLETTE (répétant). Bien fermer sa porte au loquet.


PETIT PAUL. -Nous, nous avons ouvert la nôtre
Au loup faisant le bon apôtre.


TOUS DEUX. - Ah ! ah ! ah ! oui vraiment !
Nous serons sages à présent !

FIN
 


INDICATIONS POUR LA MISE EN SCÈNE
DU LOUP, DE LA CHEVRE ET DES CHEVREAUX



     Le théâtre représente une maison de paysan. Buffet, table, chaises et tabourets en bois blanc. (On se servira de ceux de la cuisine ou des chambres de domestiques.)
     Une seule porte est nécessaire.


Costumes.

LA MÈRE. — Costume de paysanne. Jupe d'indienne ou de lainage. Corsage sans manches, celles de la chemise descendant jusqu'au coude. Tablier blanc à bavette. Grand fichu à fleurs, descendant dans le dos jusqu'à la ceinture et croisé sur la poitrine. Bonnet de paysanne (le bonnet breton est le plus facile à faire). Croix d'or. Au bras, un panier recouvert d'une serviette blanche.


L'HOMME. — Costume de paysan. Pantalon bleu ou gris. Blouse bleue. Chapeau de feutre gris ou de paille. Gros souliers. Barbe noire.


PETIT PAUL. — Pantalon de toile. Gilet sans manches. Pas de veste.


COLETTE. — Jupe de toile fond blanc. Corsage noir ou rouge. Tablier écru à bavette. Petit bonnet de velours noir à trois pièces, forme alsacienne ; cheveux passant tout autour.


Accessoires.
     Un collier de perlés bleues (ou rouges). Un petit couteau.
Un tricot, avec un peloton de laine.  Tout ce qu'il faut pour écrire, sur la table.




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