PIECES  DE  THEATRE  POUR  ENFANTS.

 
 

Série des « Bécassot »

par Raymond RICHARD

BÉCASSOT APPREND L'HISTOIRE DE FRANCE

Monologue Paysan Comique


     Bécassot entre au fond, un panier au bras et un livre à la main.

     Costume classique du paysan : blouse bleue, bonnet de coton, sabots.

     En remplaçant Bécassot par Bécassine, ce monologue peut être interprété par une fillette.


BÉCASSOT (lisant avec application). - Richelieu lutta contre les protestants, combattit la Maison d’Autriche, abaissa les Grands et rétablit le pouvoir royal...
(Interrompant sa lecture)
     Voyons ! J’ vas essayer d’ répéter :
(Ânonnant)
     Richelieu bâtit la Maison des Grands... lutta contre les protestants d’Autriche... et abaissa l’établi royal.
(Vivement)
     Non ! non ! c'est pas ça ! Le roi était tout d' même pas menuisier  !
(Avec un désespoir comique)
     Oh ! la la la ! Jamais j'arriverons à m' fourrer tout ça dans la citrouille ! J’ vas sûrement être encore puni ! Si c'est pas malheureux !
(S’animant)
     Mais aussi, comment voulez-vous que j' me retrouve dans tout ce charabia ? La Maison d’Autriche ?
(Au public)
     Vous l'avez-t-y vue, vous, c'te Maison ? Moé, j'sons jamais allé dans ce patelin-là !
(Lisant)
     Il abaissa les Grands...
(Au public)
     Ça encore, je comprends ! Ce Monsieur Richelieu devait pas aimer les grandes perches. Alors, il leur faisait couper cabêche pour les raccourcir.
     Quant aux protestants, à mon avis, ça d'vait être des gens qui rouspétaient contre la vie chère. Vous voyez ! C'est pas que j’ sois bête, oh ! Y s'en manque ! Seulement voilà, j' pouvions pas retenir les mots savants !
     D'ailleurs, j'ons jamais bien aimé l'Histoére de France. On vous parle de tas d' gens qu'on a jamais vus, de pauvres bougres qu'on assassine ou à qui on coupe le melon. Ce n' sont que des batailles, des massacres, des révolutions !
     Vous trouvez ça rigolo, vous ? Pas moé. Voyez-vous, j'ons une nature tranquille et j'aimions pas les coups !

     Et pis, toutes ces histoéres qu'on appelle de l'Histoére ne m' semblent pas claires du tout. On vous dit, par exemple : « Louis XIV est monté sur le trône à cinq ans ». Eh ben ! Vous m' croirez si vous voulez, j'ons jamais pu savoir s'il se servait d'un escalier ou d'une échelle.
     C'est comme « la cour du Roi ». Not' maître d'école prétend que Louis XIV avait une cour très brillante. Quelle drôle d'histoire ! Le roi avait beau avoir des tas de larbins, j' me d'mande comment y faisaient pour l'astiquer comme ça ! Enfin, Mossieurs, bonnes Dames, vous n' trouvez pas ça bizarre, une cour cirée ?
(Ouvrant son livre)
     Et ça, tenez ! Qu'est-ce que vous en dites ?
(Lisant)
     « Bonaparte renversa le Directoire par le coup d’État du 18 Brumaire ».
(Au public)
     Vous y croyez, vous, à c'te blague ? Not' maître nous a toujours dit que Bonaparte était un petit gringalet. Alors, comment voulez-vous que ce pauvre garçon renverse une grosse machine comme le Directoire avec un coup de pied dans l' tas ? Non, non ! C'est pas à Bécassot qu'on fera croire de pareilles balivernes.
     Mais, comme j'étions un enfant curieux, j'ai voulu avoir enfin la clé de tous ces mystères. Dernièrement, comme je n' comprenions pas la leçon, je m' suis décidé à demander : « M'sieur l'instituteur, comment c'est-y qu'on fait pour dissoudre les Chambres ? J'ons jamais pu encore faire fondre la mienne... »
     Ah ! mes amis ! Toute la classe et le maître avec s'est mise à rigoler, à rigoler... J'ons cru que l' plafond allait s'écrouler. Alors, plutôt vesqué, j' me suis assis et j'ons jamais plus rien demandé.
     Et c'est depuis c' temps-là, voyez-vous, Mossieurs, bonnes Dames, que j'ons jamais pu digérer l'Histoére de France !

Raymond RICHARD.

(Tous droits réservés)


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